lundi 4 avril 2016

état d'urgence, état policier


La rhétorique de droite prononcée par Valls : "la sécurité est la première des libertés" est tout ce qu'il y a de plus problématique. L'état d'urgence n'est pas pour notre bien. Aujourd'hui, l'état d'urgence reflète la société malade dans laquelle nous évoluons, sous un gouvernement plus à droite que la droite actuelle. Nos droits fondamentaux sont bafoués au même titre que nos libertés. Les perquisitions sans motif et avec violence s'enchainent (4000 depuis le début de l'état d'urgence), ainsi que les assignations à résidence et multiples débordements lors des manifestations. D'abord, la manifestation pour le climat. Aujourd'hui, on essaye de taire la jeunesse qui proteste dans les rues.

Hier, après la manifestation contre la loi travail, je me suis retrouvée devant Tolbiac avec quelques autres manifestants qui criaient "libérez nos camarades !", ou encore "police partout, justice nulle part", slogan sur lequel je les ai rejoints. Ce qu'il se passait ? La fac de Paris I avait été fermée le matin-même sur ordre de la présidence, les étudiants avaient à peine été prévenus d'un mail la veille au soir. Malgré l'interdiction, ils se sont réunis d'eux-mêmes devant la fac pour faire entre eux l'ag qui était déjà prévue dans l'amphi. Ils ont apparemment pu accéder à l'amphi par un accès ouvert à l'arrière et, en pleine ag, les crs sont arrivés en nombre au milieu de ces étudiants et ont commencé à frapper. Tous ont été évacués, certains menottés, d'autres en sang. Un étudiant qui avait réussi à échapper aux flics m'a raconté que, devant lui, un crs frappait une étudiante à coups de matraque au visage et ce à plusieurs reprises. Lorsqu'il est intervenu pour l'arrêter et qu'il lui a demandé s'il n'avait pas honte de frapper une femme qui ne l'avait pas attaqué et qui n'avait exercé aucune violence, le crs a simplement rigolé. L'étudiant, plein de rage, me disait qu'il n'avait vu autant de sang que dans les films. Quant à l'étudiante, elle était à l’hôpital au moment où il me racontait les faits. De mes propres yeux, j'ai vu des manifestants énervés qu'on privait de parole, à qui on bloquait tout passage, et des crs qui avançaient en nombre. Des coups ont été portés, un mouvement de foule s'est déclaré au milieu d'une panique générale pendant que j'étais en train d'expliquer à un businessman en costume -apparemment au courant de rien, que ce soit pour la loi travail ou la manif- les enjeux de cette loi. Je me suis retrouvée bloquée entre une poubelle et une barrière, devant moi un homme à terre dans de la bière renversée se faisait piétiner par ceux qui fuyaient et frapper par les crs. J'ai perdu le businessman dans la foule, ainsi que l'amie avec qui j'étais venue. Une fois retrouvée, on s'est réfugiées dans les escaliers d'un immeuble où se trouvaient d'autres personnes, avant de se faire évacuer.
Et toute la journée, des crs, des flics en civil infiltrés dans la manif; la présence policière était partout autour de la jeunesse.

Aujourd'hui, j'ai assisté à une réunion publique du département contre l'état d'urgence avec divers intervenants (représentant cgt police, cgt département, syndicat des avocats de France, mrap, sénatrice communiste, ligue des droits de l'homme, ex-assigné) et certains témoignages étaient bouleversants. Une femme française convertie à l'islam depuis un an, vivant au Maroc depuis quelques temps mais revenant souvent en France a subi les violences de l'état d'urgence. Elle n'a pas été assignée à résidence : son appartement a été perquisitionné et, suspectée d'être d'un islamisme radical, les services sociaux lui ont retiré du jour au lendemain ses deux enfants pour "environnement potentiellement dangereux". L'ex-assigné racontait l'histoire d'un autre ex-assigné, père de deux enfants, qui se rendait en vacances au Maroc il y a quelques jours, sans savoir que les services français le surveillaient et avaient communiqué son nom aux services marocains. Aujourd'hui, ce français est emprisonné dans une prison marocaine sans motif depuis onze jours.

Cet état de peur ne peut plus durer. L'état d'urgence est utilisé comme prétexte dans toute situation pour taire une quelconque rébellion (dans un lycée parisien, le personnel a privé les élèves de leur droit à manifester sous prétexte de l'état d'urgence avec menaces de sanctions). Il faut continuer de manifester, continuer de parler fort, de faire du bruit, et ne surtout pas se taire par peur et les laisser gagner. Le peuple doit s'exprimer !